Je suis un jour tombée par hasard sur le premier tome des enquêtes d’Enola Holmes de Nancy Springer dans un rayon de livre d’occasion. Vous imaginez bien que j’ai craqué. Depuis il attendait dans ma PAL et il prenait la poussière. Je m’étais déjà promise de le lire pour le British Mysteires Month, mais je n’avais pas trouvé le temps. Quand j’ai vu que Blandine et Alexielle prévoyaient d’en faire une lecture commune pour le mois Anglais, je tout de suite eu envie de me joindre à elles pour cette lecture.
Je connaissais déjà les grandes lignes de l’histoire pour en avoir vu l’adaptation en film que j’ai regardé avec Mimiko, mais je savais aussi qu’il y avait pas mal de différences entre le film et le roman et j’étais curieuse de découvrir celui-ci.
Enola vit avec sa mère dans le manoir familial où il ne reste que le majordome et son épouse comme domestique. Le jardin a pris des allures sauvages, tout comme Enola, livrée à elle-même et grandissant bien loin de l’éducation qui sied à une jeune fille de son âge. Enola a deux frères, bien plus âgés qu’elle : Mycroft et Sherlock le célèbre détective. Les deux vivent à Londres et n’ont pas remis les pieds dans le manoir depuis la mort de leur père. Enola est une fille arrivée tard dans la vie du couple Holmes, un scandale, dans la bonne société. Elle pense que c’est à cause de cela que ses frères lui en veulent, mais elle est loin d’imaginer qu’elle n’est pour rien dans leur absence. Si les frères Holmes n’interfèrent pas dans la vie de la jeune fille, c’est que la mère y veille. Ms Holmes est une femme très particulière, indépendante et faisant peu de cas de l’étiquette de la bonne société. Dans le secret, elle a donné une éducation aux antipodes de ce qui se fait à l’époque à Enola. La jeune aristocratique a été à l’école avec les enfants du village avant d’être livré à elle-même et de parfaire seule son éducation grâce à l’impressionnante bibliothèque du manoir.
Le jour de ses 14 ans, alors qu’elle s’attend à passer un moment avec sa mère (chose rare), celle-ci est introuvable. D’abord peu inquiète, Enola commence à se faire du souci ne retrouvant des traces de sa mère nulle part. Elle finit par avertir ses frères. Mycroft, en tant qu’ainé et propriétaire du manoir et tuteur de Ms et Mss Holmes, décide de mettre la jeune fille dans un pensionnat pour en faire une vraie lady, horrifié par l’éducation laxiste qu’elle a reçue jusque là. Enola, ayant hérité le caractère de sa mère, n’a aucune intention de se laisser faire. Cette vie-là, elle n’en veut pas. Elle décide alors de fuguer et de partir elle-même à la recherche de sa mère. Commence alors une véritable aventure où elle fera preuve d’un joli sens d’observation et de déduction, à l’image de son célèbre frère pour qui elle a beaucoup d’admiration. Tout comme lui, elle maîtrise l’art du déguisement. Et sa fuite aurait été parfaite, si elle n’avait pas aussi son goût pour les mystères. Alors qu’elle est en chemin pour Londres, elle apprend la disparition d’un jeune lord et décide de se mêler à l’enquête.
Enola Holmes, adaptation de Serena Blasco
J’ai beaucoup aimé ce roman. L’auteur prend le temps de mettre en place les choses, une bonne moitié du roman se passe au manoir, où l’on découvre Enola et son mode de vie, et surtout où l’on découvre en quoi il est aussi original.
Enola s’adresse au lecteur et nous raconte elle-même son histoire. Tout au long du récit elle prend le temps de nous expliquer la condition de la femme à l’époque, ce que doit faire ou ne pas faire une femme de la petite noblesse anglaise du XIXe siècle, tout en défendant vaillamment son désir de ne pas se conformer à ce mode de vie, à l’image de sa mère. Je trouve cet aspect du récit très intéressant, on ne nous livre pas une vision romantique des belles robes à froufrou, on prend le temps d’expliquer les corsets et la torture que cela implique, la question financière aussi, comment son frère se retrouve à être le tuteur de sa propre mère juste parce que les femmes ne peuvent hériter… bref, on apprend plein de choses sur la société de l’époque du point de vue des femmes. C’est instructif et ça pousse à réfléchir à la condition féminine. Enola, est une héroïne très moderne, elle aspire à l’indépendance, ne supporte pas les corsets, ne veut pas que son frère choisisse pour elle une voie qui ne l’intéresse pas et n’a que faire de la bien séance. Elle veut pouvoir vivre librement, subvenir à ses besoins et ne dépendre de personne. Cette première aventure va d’ailleurs lui donner des idées d’avenir. Elle a peut-être trouvé sa voie : experte en disparition.
Enola est très attachante, on la voit évoluer, d’abord perdue sans sa mère, elle va se prendre en main et comprendre peu à peu les motivations de celle-ci. Si elle désire toujours la retrouver, sa “mission” change au fur et à mesure qu’elle s’éloigne du domaine familial.
Quand au jeune lord disparu, si Enola retrouve sa trace et fait sa connaissance, il occupe vraiment un aspect secondaire dans l’intrigue. Ce premier tome se concentre surtout sur le personnage d’Enola et sur son chemin vers l’émancipation.
J’ai trouvé l’écriture très sympa, fluide et facile à lire. Le fait qu’Enola soit à la fois héroïne et narrateur rend le récit particulièrement vivant. Avoir vu le film avant ne m’a pas du tout gâché la découverte du roman. J’ai pris beaucoup de plaisir à le lire et ça m’a donné envie de découvrir les tomes suivants.
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⇒ lecture commune avec Blandine et Alexielle dans le cadre du challenge le mois Anglais.
⇒ Avec cette lecture je participe également aux challenges British Mysteries, A year in England, objectif PAL, lire au féminin et au challenge Polar et Thriller
film réalisé par Harry Bradbeer en 2020 avec Millie Bobby Brown dans le role d’Enola Holmes, Henry Cavill dans le rôle de Sherlock Holmes et Helena Bnham Carter dans le rôle de Eudoria Holmes (la mère)
J’avais regardé le film avec Mimiko en novembre de l’année dernière (ici mon très bref avis). Toutes les deux nous avions passé un bon moment. Le film est très vivant, avec une Enola qui prend le spectateur à partie, une intrigue pleine de rebondissements, de l’action (beaucoup d’action), de la romance…
Justement, parlons-en de la romance ! Quand j’ai demandé à Mimiko ce qu’elle avait pensé du film, elle m’a dit qu’elle regrettait qu’il y ait ce côté romantique dans l’histoire, elle aurait préféré s’en passer. Et je suis plutôt d’accord avec elle. Quand j’évoquais le film avec Blandine, elle me disait, à juste titre, que cela fonctionne très bien puisque Enola a passé sa vie coupée du monde et qu’elle a 16 ans, il est assez normal qu’elle éprouve ce genre de sentiments en découvrant le monde. Et là aussi je suis d’accord.
Bidib, faut que tu te décides, me direz-vous ? La romance elle est de trop ou pas ? Pour être tout à fait sincère, dans le film cela reste discret, ne prend pas le pas sur le reste et ça fonctionne très bien. Ce qui me pose soucis ce n’est pas tellement la romance entre Enola et le jeune lord. Ce qui me pose problème c’est qu’on ne puisse pas faire un film avec une jeune héroïne où il n’y aurait pas de romance. Est-ce que la romance est obligatoire ? C’est justement ce que Mimiko reproche au film. Une fille, un garçon, ça se termine inévitablement par “ils tombent amoureux” et ça, ça l’énerve.
Pourquoi je vous raconte tout ça ? Parce que cette fameuse romance est totalement absente du roman. Elle a été ajoutée par les scénaristes qui pour cela ont d’ailleurs dû changer l’âge des personnages. Parce que dans le roman Enola a 14 ans (16 dans le film), et le petit lord n’en a que 12. Zéro romance en vue. Pas de romantisme du tout. Enola ne se préoccupe pas du tout de séduction et compagnie. Niet. Nada !
Donc j’en reviens à ma question : est-on toujours obligé de toujours mettre de la romance dans un film avec une héroïne ? Genre, une fille qui tombe pas amoureuse ça existe pas ? Eh ben si, ça existe et ça serait sympa de les laisser exister à l’écran aussi.
Mais revenons à nos moutons : roman vs film.
Enola et Tewky (le jeune lord) ne sont pas les seuls a avoir vu leur âge changer. Dans le roman, Enola insiste beaucoup sur l’âge avancé de sa mère. Non seulement sa mère a plus de 60 ans, mais cela a une importance particulière dans la société de l’époque, le fait que le couple Holmes est eu une enfant aussi tard crée le scandale. Cet aspect est complètement effacé du film où la mère se voit rajeunie d’une bonne décennie ou deux. Mère qui dans le roman brille par son absence totale, alors que le film lui donne un très beau rôle. Dans le film elle donne une éducation extravagante à sa fille, mais y participe activement, alors que dans le roman elle ne s’occupe pas vraiment d’elle, Enola s’occupe d’elle même. De ce point de vue là je dirais que j’ai un faible pour la mère du film, très charismatique, bien plus que celle du roman, plutôt énigmatique.
Mais en dehors de ces détails, la plus grosse différence entre le roman et le film c’est l’intrigue elle-même. Dans le roman l’intrigue autour de la disparition du jeune lord est très simple et presque au second plan, tandis qu’elle est au centre du film, avec de nombreux rebondissement inexistants dans le roman.
Alors team roman ou team film ? Et bien ma foi, je serais bien en peine de choisir. J’ai aimé les deux versions. Dans le roman j’ai aimé me centrer sur Enola et la condition féminine alors que le film offre plus d’action et de rebondissement dans l’intrigue.
Et vous ? Plutôt film ou roman ?
J’ai maintenant très envie de découvrir l’adaptation en BD de Serena Blasco.
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